Jean-Jacques Rousseau : à la rencontre de l'histoire, de la littérature et de l'uchronie

Publié dans Saison 2011-2012

Introduction

Jean-Jacques Rousseau, citoyen de Genève, c'est ainsi que signe toujours l'auteur du Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes. Obstination curieuse si l'on songe que la règle au XVIIIー siècle est plutôt de publier sans nom d'auteur, pour éviter les foudres de la censure, comme l'a fait, en 1748, pour l' Esprit des lois Montesquieu. La raison en est simple : la République de Genève reconnaissait la citoyenneté à ses enfants, tandis que les royaumes voisins, dont la France, ne connaissaient que des sujets. Citoyen, le terme est au fondement de la pensée politique du siècle des Lumières, du prodige qui, dans l'homme, concilie le sujet et le citoyen et qui, par le pacte fondamental, le contrat, constitue un corps moral et collectif, dirigé par la volonté générale se confondant avec le souverain et dont la loi est l'expression. Prophète d'un nouvel univers, père des révolutions et du socialisme, Rousseau ne pouvait que faire partie des commémorations majeures de l'année 2012, 300 ans après sa naissance et 250 ans après la parution du Contrat social et d ' Emile ou de l'Education.

 

Jean Ferrari, Alain Moreau & Daniel-Henri Vincent © FSP

 

Programme

 

 Introduction par Alain Moreau, président de la Société des amis des archives de France

 

  • Rousseau et l'Académie de Dijon par Daniel-Henri Vincent, président de l'Académie des sciences, arts et belles-lettres de Dijon
  • Rousseau diplomate par Jean Ferrari, professeur émérite à l'université de Bourgogne, président de l'Association des sociétés de philosophie de langue française
  • L' honneur du bûcher : Rousseau et la censure par Michel Porret, professeur d'histoire moderne à l'université de Genève, vice-président de la Société Jean-Jacques Rouseau

 


 

  • Entre opéra et chanson : les dernières années de Jean-Jacques Rousseau compositeur par Michael O' Dea, professeur émérite à l'université Lumière Lyon II, ancien président de la Rousseau Association, membre du comité de la Société Jean-Jacques Rousseau de Genève
  • Rousseau, inspirateur de Voltaire par Sylvain Menant, professeur à l'université Paris-Sorbonne, membre du comité scientifique de la Voltaire Foundation de l'université d' Oxford
  • Des jardins d'Ermenonville au Panthéon par Raymond Trousson, professeur émérite de l'université libre de Bruxelles, membre de l'Académie royale de langue et de littérature françaises

 

En coopération avec l'Académie des sciences, arts et belles-lettres de Dijon

Présentations : (texte & vidéo)

Introduction

 

Alain Moreau


 

Rousseau et l'Académie de Dijon

 

Daniel-Henri Vincent


 

Rousseau diplomate

 

Jean Ferrari


 

L' honneur du bûcher : Rousseau et la censure

 

Michel Porret


 

Accueil du Président de la Fondation Singer-Polignac

 

Professeur Yves Pouliquen


 

Entre opéra et chanson : les dernières années de Jean-Jacques Rousseau compositeur

 

Michael O' Dea


 

Rousseau, inspirateur de Voltaire

 

Sylvain Menant


 

Des jardins d'Ermenonville au Panthéon

 

Raymond Trousson


 

Biographies

Daniel-Henri Vincent

Président de l’Académie des sciences, arts et belles-lettres de Dijon.

Daniel-Henri Vincent a effectué l’essentiel de sa carrière au sein du corps préfectoral et dans les services centraux du ministère de l’Intérieur. Affecté au ministère de la Culture, il a été également directeur régional des affaires culturelles de Bourgogne (1983-1885). Il a achevé sa vie professionnelle au ministère des Finances en qualité de trésorier-payeur général.

Il est ancien auditeur de l’Institut des hautes études de la Défense nationale (41e session).

Principales décorations : chevalier de la Légion d’honneur, officier de l’Ordre national du Mérite, chevalier des Palmes académiques, chevalier des Arts et Lettres.

Activités associatives diverses dont la Société des Amis de Bussy-Rabutin qu’il a fondée en 1986.

Ouvrages récents :

  • Bussy-Rabutin, le libertin puni, Perrin, 2011.
  • Édition des Mémoires de Bussy-Rabutin, Mercure de France, collection Le Temps retrouvé, 2010.
  • Montchapet au gré de mes jours, Éditions de l’Armançon, 2009.

 

Résumé de la communication

Rousseau révélé par l’Académie de Dijon

L’Académie des sciences, arts et belles-lettres de Dijon, fondée en 1725, a reçu ses lettres patentes en 1740. Elle organisait aussi chaque année un concours doté d’un prix. En 1749, Jean-Jacques Rousseau découvrit le sujet proposé : « Si le rétablissement des sciences et des arts a contribué à épurer les mœurs. » Il fut frappé de ce qu’on appellera « l’illumination de Vincennes » et décida de concourir. Il obtint le prix avec son Discours sur les sciences et les arts : un écrivain de génie s’éveillait. Sa renommée s’étendit rapidement. Une nouvelle tentative pour le prix de l’Académie de 1754 lui fit rédiger son important Discours sur l'origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes. Sans succès cette fois. Il est vrai, comme il le dit, qu’il ne se « trouva dans toute l’Europe que peu de lecteurs qui l’entendissent. » Jean-Jacques Rousseau a ainsi rédigé deux œuvres, dont une majeure, et rencontré la célébrité grâce, au moins pour partie, à l’Académie de Dijon. Celle-ci s’en souvient, tout particulièrement en cette année du tricentenaire de la naissance du « citoyen de Genève » qui fit plus que passer par la Bourgogne !

 


Jean Ferrari

Professeur émérite de l' université de Bourgogne, Jean Ferrari, agrégé de philosophie, docteur d'Etat (Paris-Sorbonne), a enseigné la philosophie aux universités de Rabat (1961-1972), de Vienne (1978-1982) et de Bourgogne (1982-1987 ; 1991-1998). Il a aussi exercé les fonctions de Conseiller culturel adjoint, chargé de la coopération culturelle et technique près de l'Ambassade de France au Maroc (1972-1978) et d' Autriche (1978-1982). Il a été chef de la Mission universitaire française en Italie (1987-1990).

Spécialiste de Kant auquel il a consacré de nombreux ouvrages, il a fondé à Dijon en 1988 la Société d'études kantiennes de langue française . Il a été président de l'Association des Sociétés de Philosophie de Langue Française dont il en est le président d’honneur depuis 2010.

Il a publié une quinzaine d’articles sur J.J. Rousseau et a consacré la troisième partie de sa thèse sur Les sources françaises de la philosophie de Kant à Kant, lecteur de Rousseau.

Jean Ferrari, est membre de nombreuses sociétés savantes françaises et étrangères. Il est docteur honoris causa de l’Université J. Gutenberg de Mayence.

 

Résumé de la communication

Rousseau diplomate

Rousseau diplomate ? Voilà qui peut en étonner plus d’un et pourtant l’on ne saurait exagérer l’importance, dans la vie et la pensée de Rousseau, de ce séjour qu’il fit à Venise de septembre 1743 à août 1744, en qualité de secrétaire du comte de Montaigu qui venait d’être nommé ambassadeur de France auprès de la République Sérénissime. Pour la première fois Rousseau trouvait un établissement qui correspondait à certains de ses goûts et de ses talents et en lequel, n’eût été la sottise de son ambassadeur, il eût pu demeurer. Le livre VII des Confessions comme les Dépêches de Venise, qui représentent plus de 200 pages dans l’édition des Oeuvres complètes à la Pléiade, donnent une juste idée de cette expérience diplomatique qui fit connaître à Rousseau les institutions de cette république et fut à l’origine de l’éveil de sa pensée politique.

 


Michel Porret

Professeur d'histoire moderne à l' Université de Genève, faculté des lettres, département d'histoire générale depuis 2003. Après avoir été Visiting fellow researcher à l'Université de Princeton (1990-1991), il soutenu en 1992 sa thèse à celle de Genève (Le crime et ses circonstances. De l'esprit de l'arbitraire au siècle des Lumières selon les réquisitoires des procureurs généraux de Genève, Genève, 1995, Prix Montesquieu 1995 de l'Académie Montesquieu de Bordeaux).

Corédacteur des Annales J.-J. Rousseau (Genève), de Crime, Histoire et Sociétés (CESDIP, Paris), de XVIIIe siècle ; correspondant suisse de l'International Association for the History of Crime and Criminal Justice (Paris), membre du comité scientifique international de la nouvelle Revue d'histoire des sciences humaines (CESDIP, Paris), vice-président de la Société française d'étude du XVIIIe siècle, et membre du Comité scientifique du Centre international d'étude du XVIIIe siècle Ferney-Voltaire créé, ainsi que du Comité des Rencontres internationales de Genève.

Publications au cours des 4 dernières années en solo ou direction

  • -Les vestiges du crime : enquête et expertises médico-légales au temps des Lumières (à paraître),.
  • -(DIR) Objectifs bulles. Bande dessinée et histoire, Genève, Georg, 2008.
  • -(DIR) Les réseaux de l’esprit en Europe des Lumières au XIXe siècle, Genève, Droz, 2008 (av. Wladimir Berelowitch).
  • L’Ombre du Diable : Michée Chauderon, dernière sorcière exécutée à Genève, Genève, Georg, 2010.
  • Sur la scène du crime. Pratique pénale, enquête et expertises judiciaires à Genève (XVIIIe-XIXe siècle), Montréal, P.U.M., coll. « Socius », octobre 2008 (278 p.)
  • -(DIR) Les sphères du pénal avec Michel Foucault : histoire et sociologie du droit de punir, Lausanne, Antipodes, 2007 (av. Marco Cicchini) (303 p.)
  • Sul luogo del delitto. Pratica penale, inchiesta et perizia giudiziara a Ginevra nei secoli XVIII et XIX, Bellinzona, Edizioni Casagrande (Biblioteca di storia 8), 2006,. (traduzione di Andrea Michler) (266 p.).
  • -(DIR) Sens des Lumières, Genève, Georg, 2007 (290 p.)
  • -(DIR) Le Criminel endurci : Récidive et récidiviste du Moyen Âge au XXe siècle, Droz, Genève, 2006 (av. Françoise Briegel) (395 p.)
  • --(DIR) L’Encyclopédie méthodique : des Lumières au positivisme, Genève, Droz, 2006 (av. Claude Blanckaert et Fabrice Brandli) (830 p.).
  • -(DIR) Penser l’archive. Histoire d’archives, archives d’histoire, Lausanne, Antipodes, 2006 (av. Mauro Cerutti, Jean François Fayet) (331 p.)
  • -(DIR) Lumières : Politiques et Cultures -Dix-huitième siècle, 37, Paris, 2005.
  • -Beccaria. Le droit de punir, Paris, Michalon, 2003 (125 p.).

Résumé de la communication

L' honneur du bûcher : Rousseau et la censure

En replaçant la censure des ouvrage de Rousseau dans le contexte d'interdiction d'environ 150 imprimés à Genève entre les années 1750 et la fin de l' Ancien Régime, cette brève communication évoquera la position intellectuelle et morale de l'auteur du Contrat social. S'il ne tolère pas la flétrissure de ses livres à Genève ( Emile, Du Contrat social ), il a l'intelligence d'en retourner le scandale contre ses censeurs en revendiquant l' honneur du bûcher. Rousseau censuré se retrouve détenteur de la vérité.

 


Michael O’Dea

Professeur émérite à l’Université Lumière Lyon 2.

Membre de l’UMR LIRE (CNRS Lyon 2).

Ancien président de la Rousseau Association (2009-2011)

Membre du comité de la Société J.-J. Rousseau de Genève.

Commissaire scientifique avec M. Jean-François Perrin de l’exposition « Jean-Jacques Rousseau entre Rhône et Alpes », Bibliothèque municipale de Lyon, 3 avril - 30 juin 2012.

Membre de la commission scientifique chargé de la partie « Musique » de l’exposition « Rousseau et le spectacle » (commissaire scientifique M. Guilhem Scherf, Musée du Louvre), Panthéon, Paris, 1er juillet - 30 septembre 2012.

Direction d’ouvrages :

  • Jean-Jacques Rousseau en 2012 : « puisqu’enfin mon nom doit vivre ». SVEC (Studies on Voltaire and the Eighteenth Century) 2012 :1 (janvier 2010).
  • Rousseau et les philosophes. SVEC (Studies on Voltaire and the Eighteenth Century) 2010 :12 (decembre 2010).
  • Avec Olivier Bara et Pierre Saby, direction d’un numéro spécial de la revue Orages (2012) : « Rousseau en musique ». Parution mars 2012.

 

Résumé de la communication

Entre opéra et chanson : les dernières années de Jean-Jacques Rousseau compositeur

Parmi les activités musicales des dernières années de la vie de Rousseau on peut énumérer la composition sur commande de très nombreuses chansons, l’ébauche d’un nouvel opéra, Daphnis et Chloé, qui restera inachevé, la composition de nouveaux airs pour Le Devin du village - et ce travail de copiste qui était son gagne-pain quotidien. Comment interpréter cette multiple activité ? Comment la situer par rapport à ce qui occupe aussi Rousseau, et sans doute prioritairement dans ces années-là, la rédaction des Dialogues et plus tard des Rêveries ? A partir des indices dont nous disposons, souvent fragmentaires, nous essayons de répondre à ces questions et de compléter l’image que nous nous faisons du promeneur solitaire à la fin de sa vie.

 


Sylvain Menant

Professeur émérite de littérature française à l' Université Paris-Sorbonne, Sylvain Menant a dirigé la Revue d'histoire littéraire de la France et le Centre d'étude des XVIIe et XVIIIe siècles de la Sorbonne (UMR 8599).

Ses travaux, unifiés par une réflexion théorique sur le rôle des séries, portent sur divers aspects du XVIIIe siècle, notamment sur l'histoire de sa poésie (La Chute d' Icare, Genève, Droz, 1981) et sur Voltaire (L' Esthétique de Voltaire, Paris, SEDES, 1995; Littérature par alphabet, Paris, Champion, 2e éd. 2008)

Voici les ouvrages les plus récents du professeur Menant : Héroïsme et Lumières (dir avec Robert Morrissey, Champion, 2010), Voltaire, le Père Nicodème et Jeannot (édition critque, Oxford, Voltaire Foundation, 2011), Les Amériques des écrivains français (dir., ADIREL, Droz, 2011).

 

Résumé de la communciation

Rousseau inspirateur de Voltaire

On retient surtout des relations entre Rousseau et Voltaire le violent conflit qui les a opposés. Mais c’est tardivement qu’il s’est déclaré, et il ne doit pas masquer de profondes convergences intellectuelles. D’autre part, Voltaire, lecteur de son jeune confrère, a trouvé chez lui des sources d’inspiration, soit qu’il récrive à sa manière ce qui lui paraissait manqué dans l’œuvre de Rousseau, soit qu’il nourrisse sa propre création de la contestation des thèses de son adversaire, soit qu’il subisse son influence littéraire, dans un souci de rester au goût du jour, au moment où Rousseau connaît un prodigieux succès.

 


Raymond Trousson

Raymond Trousson, professeur émérite de l’Université Libre de Bruxelles, membre de l’Académie royale de langue et de littérature françaises

Il a publié des travaux de littérature comparée (Le Thème de Prométhée dans la littérature européenne, 3e édition 2001 ; Voyages aux Pays de Nulle part. Histoire littéraire de la pensée utopique, 3e édition 1999). A publié de nombreux ouvrages concernant l’histoire des idées et divers auteurs du XVIIIe siècle, des biographies de Diderot (2005), Voltaire (2008) et Rousseau (3e édition 2012), ainsi que des études consacrés à la réception, au XVIIIème et au XIXème siècle, de ces trois philosophes.

 

Résumé de la communication

Des jardins d’Ermenonville au Panthéon

Dès la mort de J.-J. Rousseau, le 2 juillet 1778, Ermenonville, propriété du marquis de Girardin, est devenu un lieu de pèlerinage et de culte. Le 26 juin 1780, la Correspondance secrète observe : « Toutes les religions ont leurs pèlerinages ; la philosophie a aussi les siens. [...] Déjà la moitié de la France s'est transportée à Ermenonville ». Celui qui attire alors admirateurs et curieux, c’est l’auteur d’Émile et de La Nouvelle Héloïse, le « maître des âmes sensibles ». À partir de 1789, le culte, devenu politique, s’adresse à « l’immortel auteur du Contrat social ». La translation de ses restes au Panthéon, proposée dès 1791, a lieu le 11 octobre 1794 et fait l’objet de l’une des dernières grandes fêtes révolutionnaires.